vendredi 16 septembre 2005

Défense de stationner (5)

Donc les bus sont coincés en attendant qu’on vienne les délivrer. Et à l’intérieur des bus, les passagers, dont je fais partie. Et là on sent le mécontentement. On peut le palper. Vous avez eu une journée difficile, vous avez marné dans les trains, vous êtes à la bourre car on vous attend et votre bus est coincé par des c…

Combien de fois me suis-je imaginé attraper le chauffeur par le col de chemise, le faire voler dehors histoire de lui montrer comment faire, prendre le volant d’un de ces mastodontes, enclencher la première, desserrer le frein à main, appuyer à fond sur l’accélérateur et lâcher enfin la pédale d’embrayage histoire de me frayer un passage en force ? Ou mieux encore, être aux commandes d’un char Leclerc et de passer par-dessus des crêpes en ferraille. Ou mieux encore, toujours aux commandes de mon char Leclerc, pulvériser à coups de canon ces tas de ferraille. Ou mieux encore, tel Han solo aux commandes de son engin interstellaire, vaporiser à coups de canon laser ces caisses à savon.

Feu mon Capitaine !

Feu mon Capitaine !


J’entends derrière moi les autres passagers qui m’encouragent :

-Vas-y Maurice !
- Ouais ! Tu l’as eu ce trou du c… !
- Recule pour l’achever !
- Et un ! Et deux ! Et trois zéro !

Malheureusement tout cela n’est qu’un rêve. Nous ne pouvons que regarder d’un œil mauvais mais impuissant le chauffeur qui a finalement daigné se décrocher du bar en zinc, la cigarette vissée au bec, monter dans sa voiture sans un regard, faire un démarrage sur les chapeaux de roues, libérer le bus et se remettre à la même place, en attendant le prochain bus.

jeudi 15 septembre 2005

Défense de stationner (4)

Car en fait le problème majeur de cette gare, ce sont les voitures. Ou plutôt leurs conducteurs. En particulier ceux qui viennent se garer là sauvagement, en dehors des six places réservées aux voitures, sur le peu de place laissée aux bus pour manœuvrer quand ce n’est pas carrément dans les arrêts de bus, quitte à bloquer toute circulation, sans gêne ni aucun respect pour les autres.

Les forçats du ballon de côte à toute heure de la journée se disputent les places avec les ados en survêtement immaculé et casquette (brodée) assortie et qui roulent en BMW. Si à 14 ans tu n’as pas ta première BM, t’es un moins que rien. Du coup alors qu’il y a des places libres sur les parkings adjacents, les six places (j’ouvre une parenthèse qui n’a rien à voir seulement pour dire qu’il pleut à Noisy-le-Sec, drôle non ?) sont occupées, de même que l’espace aux alentours, arrêts de bus et zone de manœuvre compris. Les panneaux du style « sens interdit », « réservé aux bus » ou « arrêt interdit », c’est pour les autres. Les bus sont coincés, mais tout le monde s’en fout. Depuis l’intérieur du bistrot on ne doit voir que ça, d’autant que tous les jours, invariablement c’est la même chose, mais pas question d’abandonner sa chopine !

La crainte du PV ? Il y a longtemps qu’on n’a pas vu l’ombre d’un policier par ici. On ne va tout de même pas faire du tort au commerce local quand même ! Ce serait mentir de dire qu’ils ne font jamais le déplacement. On les voit passer au ralenti de temps à autres dans leur voiture de fonction. Ils jettent un coup d’œil désabusé mais ne s’arrêtent jamais. C’est vrai que le bus finit toujours par sortir de là. En plus ça ne pénalise qu’un infime partie de la population. Toujours les mêmes.

Seulement le bus sera en retard pour la navette suivante et comme il a des horaires à respecter, vous vous retrouverez comme un couillon, assis dans le bus, lorsqu’il sera enfin arrivé, à attendre l’heure du prochain départ qui sera retardée par les voitures qui sont garées là où il ne faut pas…

(à suivre)

mercredi 14 septembre 2005

Défense de stationner (3)

Les riverains occupant les immeubles HLM proches de la gare ont du en avoir marre d’entendre la sirène à longueur de nuit. Déjà qu’ils ont les trains à longueur d’année sous leurs fenêtres sauf les jours de grève, si en plus ils doivent supporter les jeux bruyants des jeunes sauvageons… Cela n’a pas du durer longtemps avant que les plaintes affluent à la mairie.

Même chose pour la maison Poulaga. A force de crier au loup pour rien ils ont fini par ne plus se déplacer. Un peu comme les parties de sonnettes. Sauf que là il était possible de réveiller les forces de l’ordre en pleine nuit, sans aucun risque. Rigolade assurée. Par ailleurs le commissariat étant distant de plusieurs kilomètres et qu’il y a des tas d’autres choses qui surviennent justement au moment où vous en avez besoin, l’efficacité du système était loin d’être prouvée.

A moins finalement que tout cela n’ait été mis en place pour les chauffeurs de bus au moment où il était à la mode de les agresser pour un oui ou pour un non. En effet, sauf à être vraiment à côté du bouton d’alarme, au-delà de 20 mètres je doute de l’efficacité. A moins de mesurer 1,90 m et peser 110 kilos.

Assez rapidement l’alarme sonore a été désactivée pour ne plus gêner les riverains de même que la caméra et le micro. Plus tard il n’est plus resté que le gyrophare que j’ai vu clignoter pendant des jours et des nuits jusqu’au moment où les ampoules ont rendu l’âme. Le moteur lui a continué de tourner plus longtemps.

Bref un nouveau fiasco qui a coûté combien ? Sans compter les nombreux véhicules qui y ont laissé des pare-chocs, des éclats de phare ou de peinture, mais ceux-là je ne les plaindrai pas ! Au contraire !

(à suivre)

mardi 13 septembre 2005

Défense de stationner (2)

A une époque faste, peut-être y reviendrons-nous contraints et forcés à cause de la hausse du prix de l’essence, il y avait au moins 6 lignes de bus qui desservaient la gare. Les 6 arrêts sont toujours matérialisés bien qu’il n’y ait plus que 5 lignes qui fonctionnent, apparemment. Il fallait les loger ces arrêts d’ailleurs, étant donné le peu de place. Les bus ne peuvent s’y engager qu’en empiétant sur la voie de circulation en sens inverse ou en montant sur le trottoir, histoire de secouer un peu plus ses passagers.

Chaque arrêt a été équipé à une époque, de panneaux d’affichage qui renseignaient de façon fixe sur le numéro de la ligne et la destination. De superbes compteurs donnaient l’heure du prochain départ. En fin je n’ai pas le souvenir de les avoir jamais vu fonctionner. Il faut dire que les trains étaient d’une telle régularité…Combien ça a coûté comme dirait l’autre ? Il n’en reste que des vestiges de plastique et de métal brossé, aux couleurs (passées) de la ville. Les chiffres et les lettres se décollent, des graffitis et des autocollants apparaissent et disparaissent au fil du temps.

De la même manière, à une époque où l’insécurité était un cheval de bataille de nos chers élus, des bornes d’urgence ont été installées au niveau de chaque arrêt de bus. Etant reliées au Commissariat le plus proches (à 7 ou 8 mm), il suffisait au voyageur arrivé dans sa jungle de banlieue, en cas d’agression, de courir jusqu’à la borne la plus proche pour déclencher l’alerte, une alarme sonore, un gyrophare, une fois la liaison faite avec le commissariat, expliquer clairement la situation devant la caméra et le micro intégrés et attendre l’arrivée de la cavalerie légère.

(à suivre)

lundi 12 septembre 2005

Défense de stationner (1)

J’ai parlé de trains et des bus jusqu’à présent, des voyageurs que je côtoie au quotidien, mais jamais encore des parkings de la gare. Je vous rappelle, au cas où vous ne l’auriez pas compris, que je ne viens jamais en voiture à la gare. Fidèle à moi-même et décidé de boire le vin jusqu’à la lie, je prends le bus.

Des parkings, il y en a quatre. Un petit au centre, devant la gare, un à gauche de la gare pour ceux qui habitent à gauche de la gare, un à droite de la gare pour ceux qui habitent à droite de la gare ou à gauche mais qui n’ont pas trouvé de place sur le parking de gauche et enfin un parking excentré pour ceux qui habitent à gauche ou à droite mais qui sont arrivés trop tard pour trouver une place sur les parkings les plus proches. En dernier ressort il reste les trottoirs des rues de la zone industrielle voisine.

Entre la gare et ses trois parkings, au centre du décor donc, on trouve une petite place piétonne autour de laquelle se sont installés quelques commerces plus ou moins florissants. L’endroit est carrément glauque malgré les quelques cabines téléphoniques et les efforts déployés par la municipalité pour fleurir cet endroit. Vous y trouverez un café-restaurant-PMU-Rapido, un tabac-Loto-Euromillions, un kebab, le marchand de journaux vient de fermer, une pharmacie, un poste de Police Nationale qui a fermé depuis belle lurette, une épicerie (l’arabe du coin de la gare ouvert le 365 jours par an), une pizzeria et ses livreurs kamikazes en mobylette, un centre d’appel téléphonique pour les pays exotiques qui avant faisait de la coiffure afro et encore avant auto-école, un réchauffeur de baguettes pas cuites sans goût ni saveur et de viennoiseries. C’est aussi un des lieux privilégiés de rassemblement d’une certaine jeunesse.

(à suivre)